Les livreurs des plateformes à vélo face aux failles du régime auto-entreprenarial

Mobilisation au hub d’Auteuil des livreurs Frichti, après que seule une partie d’entre eux ait été régularisée

Vendredi 16 octobre, à la veille de l’arrivée des marcheurs sans-papiers - parti·es des quatre coins de la France pour converger vers la manifestation nationale à Paris, nous nous sommes entretenu·es avec le cofondateur du CLAP [Collectif des Livreurs Autonomes de Paris, NDLR], Jérome Pimot, pour échanger autour des travailleurs de plateforme de livraison de repas à vélo, dont recouvre la lutte des livreurs sans-papiers de Frichti.

Entretien.


Au début de notre entretien, Jérôme Pimot nous fait part de son accident de vélo, survenu quelques jours plus tôt, lors de sa tournée quotidienne de ramassage postal. Sous le choc, il s’estime chanceux d’avoir été correctement équipé lors de sa chute qui engendra -tout de même- une fracture interne du coude, une opération, et un arrêt de travail de plusieurs semaines. 

Le récit de cette mésaventure amorce le début de cette discussion.


Roue libre

LaMeute: S’il était arrivé un accident similaire à un livreur de repas, que se passerait-il?

Jérôme Pimot: S’ils leur arrivaient un accident similaire, cela serait dramatique. Les livreurs n’ont rien, alors que je suis salarié. Je suis donc couvert par la sécurité sociale. Le salariat me permet d’avoir une garantie. Tous les accidents de livreurs ont une répercussion significative, qu’ils soient avec ou sans-papiers. Le statut d’auto-entrepreneur n’est pas prévu pour ce type de risque. 

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Jérôme Pimot, co-fondateur du CLAP

“La casse de l’encadrement du travail. La casse de l'hôpital. La casse de la sécurité sociale. L’uberisation est une urgence équivalente à celle de la crise sanitaire mondiale.”

Alors que tout notre socle social repose sur la sécurité au travail, les plateformes sont arrivées sur le marché en décidant de recourir à un statut qui fait faire n’importe quoi, à n’importe qui, sans couverture sociale. C’est antisocial de faire travailler des personnes de cette façon.

La casse de l’encadrement du travail. La casse de l'hôpital. La casse de la sécurité sociale. L’uberisation est une urgence équivalente à celle de la crise sanitaire mondiale. Il ne faut pas laisser faire. On organise la flexibilité du travail. Politiquement, c’est antisocial et l’antisocial plaît aux décideurs. Quand l’article de Libération [sur Frichti, NDLR] est publié, c’est un coup de tonnerre. Frichti panique. Ils envoient le même mail à 90% des sans papiers. En un clic tout est terminé. C’est ça la flexibilité.

L.M: C’est une zone de flottement à l’avantage des plateformes qui emploient des indépendants en tant qu'auto-entrepreneurs. C’est bénéfique aux entreprises puisque très peu d'individus connaissent leurs droits. 

J.P: C’est une flexibilité dont ils savent user en tout temps. Stuart [filiale du groupe La Poste depuis 2019, fondée en 2015, NDLR] vient ajouter une couche par rapport à l’exploitation et aux sans-papiers. L'année dernière, Stuart a vérifié les papiers de ces livreurs. De nombreux livreurs m’ont rapporté, qu’il avait été remarqué que des coursiers avaient des faux-papiers, sans qu’ils ne soient, pour autant, suspendu. Avec l’affaire Frichti, Stuart a progressivement exfiltré les sans-papiers de son réseau.


L.M: Est ce que les livreurs des plateformes sont majoritairement sans papiers?

J.P: C’est le cas, notamment sur les plateformes françaises. Frichti et Stuart représentent l’avenir du travail antisocial. On laisse faire jusqu'à révélations ou suspicions.

Les plateformes étrangères savent que les autorités scrutent leurs activités à la loupe. Pour ces entreprises, les livreurs sans-papiers passent par des tiers : des auto-entrepreneurs avec des comptes actifs qui sous-loue à des sans-papiers. Delivroo [plateforme anglaise fondée en 2015, NDLR] ou Uber Eats [plateforme américaine fondée en 2015, NDLR] regardent ailleurs de temps en temps.

Légalement, vous imaginez le cap entre le légal et la précarité? Tous les précaires ne sont pas procéduriers. Les fondamentaux du droit ne sont plus du tout appris: à partir de combien de salarié·es as-tu le droit d’avoir un conseiller syndical? Un délégué du personnel? Un comité d’entreprise? 

En Italie, une responsable d’Uber risque le pénal [lire aussi ici et ici]. En Californie, berceau de l’uberisation, la loi AB5 est combattue par Uber et ses rivaux. L’Etat californien a décidé que les travailleurs des plateformes devaient être considérés comme des employés, avec un salaire minimum et des conditions propre à leur activité [cette décision a été prise au début de l'année 2020 et concerne les services de réservation de voiture avec chauffeurs, NDLR]. En contrepartie, Uber s’est allié à ses rivaux [lire ici] pour faire une campagne de lobbying contre cette loi. C’est hallucinant!

Il n’y a pas d’autres endroit au monde où l’uberisation prospère autant qu’en France. Ce qui me fait dire qu’ici c’est l’Eden.

Il n’y a pas d’autres endroit au monde où l’uberisation prospère autant qu’en France. Ce qui me fait dire qu’ici c’est l’Eden. La politique économique et antisociale du gouvernement est néfaste. Elle incite les plateformes à faire ce qu’elles veulent. Il n’y a aucune réglementation.

Portrait d’un livreur Frichti lors de la manifestation pour la régularisation des sans-papiers le 20 Juin 2020

L.M: Les livreurs de Frichti sont nombreux à m’avoir révélé toucher 5€/h puis 0,50€ la course. Ils sont payés bien au-dessous du SMIC horaires. Est-ce dû au manque de législation du statut d'indépendant/auto-entrepreneurs?

J.P: Ils ne sont pas salariés, donc pas annexés au code du travail et au SMIC [le SMIC horaire  est de 10,15€ brut au 1er Janvier 2020, NDLR]. C’est un retour au XIXe siècle. 
Au XIXe, il n’y avait pas de droit du travail, pas de salariat. Ce sont les patrons qui décidaient. A l'époque, ces choix verticaux entraîneront la population à s’organiser et manifester afin d’obtenir des conditions garantissant les droits des travailleurs.

L’uberisation contourne le droit du travail. C’est pour ces raisons que nous alertons, avec le CLAP, pour que l’uberisation soit encadrée. Dans le code du travail, on parle de flexibilité - au niveau des horaires notamment. Ce sont des professions qui sont encadrées par des conventions collectives. Les individus sont salariés. Pourquoi les livreurs n’en feraient-ils pas parti? Les plateformes ne veulent pas d’un code du travail qui les empêcheraient de réaliser leur dessein.

 

L’uberisation, vers la destruction des acquis sociaux


L.M: La mise en valeur de l’économie a pour revers la destruction des structures sociales et la paupérisation évidente de la société française.

J.P: Et la construction d’un nouveau modèle pour le monde. La France est une exception culturelle à de nombreux niveaux. C’est devenu, en quelques années, une exception économico-culturelle. Un exemple à suivre : “Regardez la France. La start-up nation ça fonctionne. Les Gilets Jaunes? Ce sont les français réfractaires.” Finalement, ça passe. Dans la violence, certes, mais ça passe.

L’uberisation, c’est l’attaque du salariat -particulièrement en France où il était l’un des plus solide au monde. Si il y a encore l’image d’Epinal de la qualité de vie à la française, c’est parce qu’elle repose sur son socle social. 
L’auto-entreprenariat, les plateformes, l’uberisation nous remettent face à cette priorité qu’est la santé. La peur de l’accident. La transformation des kilomètres en euros. Chaque kilomètre, chaque minute, c’est des euros. Quand tu commences à compter en euros, tu prends des risques. Ces risques, un jour tu les paies. Si tu es un travailleur sans-papiers, je te garantie que la qualité de vie à la française, tu ne la connais pas.

L.M: L’uberisation naît de l’engouement que distille Uber et Uber Pop puis Heetch, en 2014. Il a été, du jour au lendemain, très facile de gagner de l’argent. Ce fut comme des appel d’offres à destination de tous les détenteurs d’une automobile. De cette attraction est née une image dont les groupes/entreprises ont su profiter. En réalité, les plateformes de livraison de repas à vélo calquent cet effet. Au début, on est généreux puis on ferme progressivement dans un étau les grilles tarifaires. 

J.P: Quand tu fais un parallèle avec l’histoire du droit du Travail qui s’est construit avec la loi dite “Waldeck Rousseau” (1884) [loi autorisant la création de syndicats, NDLR], puis la naissance de la CGT (1895), jusqu'à la création du ministère du Travail et la naissance du droit du travail (1906 et 1910), la construction s’est faite sur long terme. Avec les plateformes, la régression va très vite.

En 2013-2014, il n’y a pas réellement de client. C’est avec l'arrivée d’une boite comme Take It Easy, en 2015, que naît réellement, la livraison à vélo. Il arrive avec une culture vélo importée de Belgique. Take It Easy c’est 16M€ de levée de fond face à Tok Tok Tok [plateforme de livraison de repas lancée en 2013 sur Paris puis, fermée en 2016, NDLR] qui n’avait que 1,5M€, deux ans plus tôt. Avec Take It Easy, un storytelling se met en place. La communication sort des sentiers battus. On commence à voir des 4/3 dans le métro. Des publicités sur des formats web. Code promo par si, avantage par là. La livraison à vélo s’institutionnalise. Elle devient un phénomène de société. 

Les livreurs sans papiers radiés par Frichti présents devant le Hub d’Auteuil

Les livreurs, “objet” antisocial.

L.M: Comment les plateformes se servent de l’objet ‘vélo’ pour construire leur promotion marketing? Cela induit un questionnement autour des matériels mis à la disposition des livreurs. En sachant que n'étant pas salariés, ils ne bénéficient pas de visite médicale donc aucun avis de conformité n’est mis en évidence sur les effets provoqués par les équipements, comme le port du sac, par exemple.

J.P: Les sacs sont construit pour que la commande soit sécurisée. Le produit client passe avant le coursier. Si le sac fait deux- trois kilos à vide - les gros cubes sont par nature déportant et te tire vers l'arrière - ca n’a aucune ’importance. Chez les Frichti et les Stuart, parfois, ils partent en tournée avec 10-15-20 commandes. Avant, ils étaient payés 2 euros la commande; maintenant 50 centimes, donc ils se chargent. Ils ont des sacs de 70L, dans lesquels ils transportent des aliments qui sont parfois très lourd. Après, tu entends les plateformes qui te disent: “le vélo est une mobilité douce. On vous livre écologiquement des salades de boulgour bio, équitables, tracées.” Tout ça livré par une personne sans-papiers payée au lance pierre.


L.M: Est ce que l'équipement est complet si, demain, tu affrontes une journée de pluie? Tu as des pantalons avec?

J.P: Non. Les plateformes te diront que ce n’est pas quelques choses qui va facilement visibiliser une marque donc c’est au livreur d’avoir son propre matériel car il est indépendant.


L.M: Ce qui signifie que le matériel qu’on te donne est avant tout conçu pour le marketing?

J.P: Le livreur est principalement un homme sandwich. Uber Eat recrute un maximum de gens, en les payants uniquement quand il roule le sac plein. Un livreur quand il revient vers un KFC, un Burger King ou un McDo, à vide, participe à la promotion des plateformes. 
Bien évidemment que le matériel est un produit de marketing. Le livreur est secondaire. Si, la condition des livreurs importaient les plateformes, elles auraient investi dans des casques. Sauf qu’un casque n’a qu’une petite visibilité.
En 2020, les plateformes continuent à perdre de l’argent car elles sont encore dans un processus de communication. Cette stratégie leur coûtent et elles le répercutent sur les tarifications des livreurs en les payant de moins en moins. 


L.M: Qu’est ce qu’une prime exactement?

J.P: Les primes pluie, intempéries, jour de match. Ce sont tous les avantages qui font que tu vas chez Delivroo plutôt que chez Uber Eat. C’est toute la partie non-contractuelle du tarif. Pour attirer de nouveaux livreurs, il fallait mettre en avant ce point. Un exemple, en 2015, si un livreur cumulait 135h sur deux semaines, il était revalorisé de 7,5€ à 10€/h. 


L.M: Ce que tu me dis me fait penser au portrait du livreur de Frichti qui a parcouru 1500 km, en un mois. Presque l'équivalent d’un aller-retour Paris/Marseille. La prestation physique est, en somme, remarquable mais la manière dont est tournée l’objectif paraît impensable. Frichti fait en sorte de conditionner ses livreurs, afin de réaliser des objectifs, qui les mèneront à des primes pour accroître le chiffre d’affaire de la plateforme.

J.P: Chez Frichti, c’est assez intensif car ce sont des tournées de livraison. Les livreurs sans-papiers, ils arrivent en France, ils sont jeunes, ils ont envie de travailler. De bien faire. Le livreur qui a parcouru cette distance, on l’appelle “La machine”.

En Occident, on est sur un schéma qui valorise les individualités. On valorise les sportifs. Les artistes. On est plus du tout sur de la valorisation du travail collectif dans ce qu’elle a de bénéfique, d’un point de vue social.

En Occident, on est sur un schéma qui valorise les individualités. On valorise les sportifs. Les artistes. On est plus du tout sur de la valorisation du travail collectif dans ce qu’elle a de bénéfique, d’un point de vue social. On va à l’encontre de l'énergie citoyenne. Solidaire. En France, on est entrain de le perdre. Si on le perd, c’est la muraille qui s’effondre car on est l’exemple du modèle social, du collectif, qui a fonctionné. 

L.M: D’un point de vue “collectif”, quel rôle a le consommateur? Les consommateurs sont-ils conscient des enjeux qu’il y a derrière ces vitrines à la demande ou sont-ils complètement annihilé par leur quotidien?

J.P: Le problème du consommateur c’est qu’il est un personnage que l’on a énormément infantilisé. La campagne des plateformes met en avant un produit séduisant. Attractif pour le consommateur. C’est un poison d’apparence. Les plateformes n’ont eu pour réponse que lutter contre la prise de conscience de certains de leurs premiers clients. Elles sont obligées d’aller chercher, des clients et des livreurs, dans des zones ou leur présence est sporadique.
Il est difficile d’extraire le discours antisocial d’un produit facile à consommer. C’est l’éternel combat face aux fast food.

Les livreurs de Frichti radiés de la plateforme lors de la manifestation pour la régularisation des sans-papiers le 20 Juin 2020

Du CLAP à la troisième vague des livreurs sans papiers de Frichti

L.M: A quel moment est fondé le CLAP?

J.P: On a cofondé le CLAP suite à une manifestation des VTC, en mars 2017. A cette époque, l’uns des leaders des VTC - Sayah Baaroun - organise cette manifestation. A cette occasion, des livreurs à vélo se retrouvent place de la République, en se disant qu’ils pourraient être avantageux de se structurer. Peu après, on organise une réunion à la Bourse du Travail. En mars-avril 2017, on élabore des stratégies d’actions et de visibilisation parce que beaucoup sont remontés. Au printemps 2017, on est en pleine élection présidentielle. L’élection draine des cortèges d’anti-Macron et Fillon. Au même moment, le Front Social [lire ici et ici], issue notamment de SUD et de la CGT-info’COM et d’autres, émerge et organise des grandes manifestations contre Macron et son monde. Le CLAP qui vient de se créer est très vite signataire des appels.


L.M: Quels sont les évènements avant 2017 qui mènent à la création du CLAP ?

J.P: Les rémunérations. Les changements de conditions de travail. Les baisses de tarifs. Les primes et bonus qui disparaissent. Petit à petit, les rémunérations qui au départ sont très attirantes pour faire venir des livreurs, voir les piquer à la concurrence, fondent. 

En 2017, les livreurs sont majoritairement des étudiants. Quand tu recrutes des étudiants, tu tombes, mathématiquement, sur des livreurs politisés, des étudiants en sciences sociales ou en histoire. C’est  cette concordance d'éléments qui génèrent la naissance du CLAP. Quand je commence la livraison, en 2014, je ne suis pas politisé. Je ne suis pas militant. Je ne suis pas syndicaliste. Je suis juste une personne qui veut travailler correctement, à vélo. Quand je me rends compte des conditions de travail et, surtout, quand des livreurs me racontent les leurs, je prends conscience qu’il y a un problème avec cette plateforme. En 2014, Tok Tok Tok se repose déjà sur cet abus. L’entreprise comprend la faille du régime auto-entreprenarial, créée en 2008 sous le mandat de Nicolas Sarkozy.

L.M: Où en est-on concernant la régularisation des livreurs sans papiers de Frichti, à la veille de la marche des solidarités ?

J.P: On va commencer à communiquer sur les prud’hommes. La deuxième vague a eu rendez-vous avec la CGT le 11 septembre 2020. La CGT leur a dit qu’ils ne pouvaient pas grand chose pour eux, et qu’ils pouvaient toujours envoyer un mail au Ministère de l'Intérieur - c’est ce qu’ils m’ont raconté en sortant de la réunion. Fin août, on était décidé à écrire une lettre ouverte au préfet. Cette lettre n’est jamais partie parce que la CGT a fait sa proposition de rendez-vous début septembre. Dès lors, on était dans l’attente.

Fin septembre, les délégués décident d’envoyer un mail au Ministère. Mi-octobre, on a toujours aucune réponse. Les livreurs sont entrain de prendre conscience que la seule alternative crédible, c’est les prud’hommes. Actuellement, avec SUD Commerces, la CNT-SO et Service et Maître Mention, on remet en place la stratégie initiale.
Il faut savoir qu’il y a deux catégories de livreurs: les livreurs qui travaillaient à leur compte et ceux sous alias. Les alias, au niveau des prud’hommes, c’est un peu plus compliqué car ils sont sur le compte de quelqu'un. Ils étaient payés en liquide. Il va donc falloir qu’ils cherchent des preuves de leur activité avec les sommes perçues. 

Les livreurs sans papiers de Stuart au coté des livreurs de Frichti durant la semaine lors de la marche des solidarités d’octobre

L.M : En quoi est ce optimal pour eux d’aller aux prud’hommes ? Vont-ils avoir les conditions d’une éventuelles régularisation ?

JP : Ils n’ont pas d’autres choix que d’aller aux prud’hommes pour déqualifier les mois de travail chez Frichti et transformer leur facture en fiches de paie. Une procédure de régularisation exige de fournir des fiches de paie pour prouver l’activité sur le territoire. C’est ce qui est décrit dans « la circulaire Valls » de 2012. Mais les factures d'auto-entrepreneur elles, ne comptent pas.
Quand on voit d'ailleurs le nombre de sans-papiers chez les plateformes, on devrait envisager d'actualiser cette fameuse circulaire....


Le lendemain, la Marche des solidarités aura rassemblé une foule dense. Dans une ambiance festive, nous croisons le cortège des sans-papiers de Frichti rejoint par des livreurs arborant des drapeaux au couleur de la plateforme Stuart. Un petit groupe qui prend du relief au côté des marcheur·es qui ont parcouru la France pour se rejoindre, en ce jour, à Paris. 

L’entretien de la veille résonne avec son lot de questionnement. En ce samedi après-midi, comment ne pas penser à toutes ces professions sous statut auto-entreprenarial? Graphistes, photographes, salariés de la restauration et de l'événementiel, masseurs, chef de projet, consultants, coachs sportifs… De nombreuses professions sont concernées par ce changement de nature professionnelle. Les entreprises normalisent l'accession à ce régime sans nous mettre en garde face à la perte imminente de nos droits. Qui les empêchera, demain, de généraliser ce procédé à l’ensemble des secteurs? De calquer la création d’un “éco-système” hérité des plateformes? 

En ces temps de crise sanitaire, de généralisation du télétravail et des licenciements, le traitement reservé aux sans-papiers des plateformes devrait nous alerter par sa brutalité et son sens profond. Il n’est pas si loin le temps ou sous couvert de coronavirus, ces livreurs enfourchaient leur vélo pour exercer une activité au détriment de leur intérêts personnels. Il n’est pas si loin le temps des louanges sur  “les dernier·es de cordée” qui se retrouvent, aujourd’hui, mis sur la touche en un clic. Il n’est pas si loin le temps… Et, pourtant !

 
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MERCI POUR VOTRE LECTURE

La réalisation de cette interview a nécessité 3 personnes et plus d’une vingtaine d’heures de travail cumulées.

- Propos recueillis, photos et texte : Izpho

- Relecture : Mes

- Mise en ligne : Graine

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